9ème fil: Ta tante aveugle n’aura pas d’enfants.

Quand tu es née, c’est elle qui m’a appris à t’allaiter. Si le nouveau-né ne tête pas suffisamment, il ne survivra pas. Tu vois comme j’enfonce d’un coup le mamelon dans la bouche de ton petit frère? Ma soeur savait, elle me montrait avec ses mains, alors qu’elle n’avait jamais allaité elle-même, ni vu allaiter.

Ma soeur était ma consolation quand j’étais une petite fille. Nous avons été élevée par une grand-mère qui nous racontait des histoires terrifiantes, de barbares au nord qui enlèvent les jeunes filles, de renardeaux aux dents pointues, et d’autres encore plus horribles de rois et de malédictions que je préfère oublier. Mais le soir, au lit, j’allais me blottir dans ses bras. Elle me caressait les cheveux et me chuchotait dans l’oreille, sans se soucier de l’heure:
–  Notre mère était la plus douce, la plus habile, la plus belle du village.
Je l’enviais d’avoir connu ma mère, avant qu’elle ne meure en me donnant la vie.
–  Rappelle, rappelle-toi encore!
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